TRAITEMENT APL DU SIGNAL. APPLICATION A LA RESONANCE MAGNETIQUE

 

Claude Chachaty

claude.chachaty@wanadoo.fr

 

 

 

Dans le contexte de cet article nous entendons par signal, une grandeur physique observable  dans un domaine limité  de temps ou de  fréquences, qui se distingue d'une manière significative du bruit de fond propre au système de détection utilisé. Ce qui ne fait pas partie du signal est appelé ligne de base. Pour être identifié et analysé, le signal enregistré sous forme analogique est numérisé et conservé dans la mémoire d'un ordinateur. On peut ensuite filtrer le bruit de fond, éliminer les distorsions éventuelles, puis analyser et  si possible interpréter le signal

.

I - Amélioration du rapport signal/bruit

 

La transformée de Fourier (T.F.) est  souvent employée en spectroscopie pour améliorer le rapport signal-sur-bruit et pour passer d'un domaine de temps à un domaine de fréquences et vice-versa. La T.F. d'une raie ou d'un ensemble de raies (spectre) doit être effectuée sur un nombre de points égal à une puissance entière de deux. Elle se présente généralement comme une courbe périodique amortie       (voir figure 1).

La relation  entre un signal F()  fonction de la fréquence et sa T.F.  f(t) fonction du temps t est :

 

                                                                  [ 1 ] 

 

Le signal f(t) est généralement appelé "interférogramme" ou plus spécifiquement  "signal de précession libre" en résonance magnétique. Le filtrage du bruit s'effectue en multipliant la fonction f(t) par une fonction w(t) (filtre) qui annule ou réduit le bruit dans la partie de l'interférogramme où le signal devient négligeable et en effectuant la transformée de Fourier inverse :

 

                                                     [ 2 ]

 

La fonction TRANSFO qui effectue ces opérations, utilise les filtres usuels :

rectangulaire , exponentiel  ou  gaussien.

 

TRANSFO

'Vecteur ou  tableau XY0 à transformer' DIM0„1†½VEC0„XY0„Œ

–(2=½½XY0)/'VEC0„XY0[;2]'

    ©

    © --- Compléter le nombre de points à une puissance entière © de 2:

    ©

DIM1„1†(DIM0ˆ2*¼13)/2*¼13

 

'Nombre de points : ',DIM„½VEC„VEC0,((DIM1-DIM0)½0)

'Spectre XY1' ª PLOT XY1„(¼DIM),[1.5]rDV„VEC

 

RFFT ª 'Transformée de Fourier : TFV0'

PLOT (¼0.5×DIM),[1.5](0.5×DIM)†TFV0„rDV

L0:'Filtre rectangulaire [1], exponentiel [2] ou' 'gaussien [3] ? '

…(Ÿ/2 3=CHX„Œ)/L2

    ©

L1:'Nombre de points significatifs de TFV0' ª NPTS„Œ

WT„WT,²WT„(NPTS½1),((.5×DIM)-NPTS)½0 ª …L3

    ©

L2:'Paramètre de convolution (‘L) ' ª ‘L„Œ

ARG„‘L×¼0.5×DIM ª –(CHX=3)/'ARG„0.5×ARG×ARG'

WT„WT,²WT„*-ARG

    ©

L3:iDV„0×rDV„TFV1„TFV0×WT ª 'TFV0×WT = TFV1'

PLOT (¼0.5×DIM),[1.5](0.5×DIM)†TFV1

IFFT ª XY2„((-DIM0),2)†(¼DIM),[1.5]rDV

–(2=½½XY0)/'XY2„XY0[;1],[1.5]XY2[;2]'

'' ª 'Spectre lissé : XY2 ' ª '' ª PLOT XY2,VEC0

'Correct ? [1]'ª …(1¬Œ)/L0

'Nom attribué à XY2: ' ª –,'„','XY2'

 

 

Les fonctions RFFT et IFFT existent dans la zone FFT d'APL+WIN. La  fonction RFFT effectue la T.F. sur le vecteur réel  rDV qui représente le spectre de fréquences F() et génère un nouveau vecteur également nommé rDV correspondant à l'interférogramme f(t). IFFT effectue la transformée de Fourier inverse sur le produit f(t).w(t)  et donne G().

Le filtre rectangulaire modifie peu la forme de F(), les filtres exponentiel et gaussien donnent par contre un spectre  moins  résolu que  F().  La T.F. d'une exponentielle décroissante exp(-at) est la Lorentzienne , celle d'une Gaussienne  est la Gaussienne . La T.F. du produit f(t).w(t) équivaut donc à la convolution de F() par une Lorentzienne ou une Gaussienne. Cela signifie que le spectre "lissé" G() est la somme de Lorentziennes ou Gaussiennes dont les sommets sont les points du spectre initial  F().

Pour effectuer une convolution Lorentzienne ou Gaussienne de F(), il n'est pas indispensable  d'utiliser la T.F., il suffit  d'effectuer les opérations :

G F+.(X*2)+(X °. - X)*2   ou  G F+.* - ((X °. - X)*2)2X*2

X est la demi-largeur  à mi-hauteur de la Lorentzienne ou au points de pente maximum de la Gaussienne. X , F, G correspondent respectivement à , F() et G().  La transformée de Fourier est par contre toujours utilisée pour convertir en spectre de fréquences l'interférogramme f(t) obtenu directement par des techniques telles que la résonance magnétique, l'infra-rouge ou la spectroscopie Raman.

La fonction LISSAGE permet d'éliminer le bruit ("gazon") de densité très supérieure au signal à extraire sans utiliser la T.F et joue le même rôle que la fonction TRANSFO. Elle convient au lissage d' un spectre F() dont le nombre de points N est une puissance entière de deux. Cette fonction applique successivement sur F() des masques binaires représentant  N/n fois les lignes ou les colonnes de la matrice unitaire  n °.= n,  N1 0 0 0, N0 1 0 0, N0 0 1 0 et N0 0 0 1 par exemple. En faisant la moyenne du résultat de ces opérations, on obtient un spectre à N/n points que l'on interpole log2(n) fois pour lui donner la  dimension N, en utilisant la méthode d'interpolation aux différences finies de Gauss.

 

LISSAGE

'Nom du spectre (dim=2*N) :' ª dim0„1†½XY0„Œ

X0„XY0[;1] ª 'Facteur de lissage (fac=2*n, n<<N): '

mat„(¼fac)°.=¼fac„Œ

    ©   

    © --- réduction du nombre de points

    ©

i„1 ª xy„(dim0½mat[1;])šXY0

:while i<fac

xy„xy,(dim0½mat[i„i+1;])šXY0

:endwhile

    ©

    © --- Moyenne des spectres réduits:

    ©

xm„+/((2×fac)½1 0)/xy ª ym„+/((2×fac)½0 1)/xy

    ©

    © --- Interpolation par la méthode de Gauss

    ©

PLOT XY1„(2µfac) interpoler (xm,[1.5]ym)÷fac

'Nom attribué au spectre lissé : ' ª –,'„','XY1'

 

 

 

Figure 1. (1) signal F() non traité,  (2) interférogramme f(t) obtenu par T.F. de (1), (3) produit de f(t) par un filtre rectangulaire w(t), (4) signal G() obtenu par T.F. de (3).

 

 

II - Correction de la ligne de base.

 

La fonction RECTIFIER est destinée à éliminer la dérive et les distorsions de la ligne de base. Elle fait appel à la fonction APLANIR pour réduire les ondulations résiduelles de la ligne de base et les pics parasites. Pour faire ces  corrections on prélève  deux segments de ligne de base de part et d'autre du signal à traiter (AB et CD de la figure 2-II), ajuste à ces deux segments un polynôme, généralement de degré 4 par les moindres carrés, calcule les toutes les valeurs du polynôme entre A et D. La courbe AD est soustraite globalement du signal de façon à supprimer la distorsion de ligne de base. La fonction RECTIFIER est spécialement conçue pour traiter les spectres de résonance paramagnétique électronique (RPE) dont cette figure  donne un exemple. Ces spectres sont le plus souvent enregistrés sous forme de dérivée d'absorption en fonction d'un champ magnétique croissant linéairement (voir réf. [1]); cependant la correction de ligne de base est effectuée  sur la courbe d'absorption elle même après  lissage, correction sommaire de la ligne de base et intégration de la dérivée.

 

 

RECTIFIER

'Nom du spectre (dérivée d''absorption): '

XY0„Œ ª X0„XY0[;1]

    ©

    © --- correction préliminaire de la ligne de base:

    ©

XY0[;2]„XY0[;2]-0.5×XY0[1;2]+¯1†XY0[;2]

TAB„X0,[1.5]+\XY0[;2]

NPT„10 ª DIF„+/(((-NPT)†TAB[;2])-NPT†TAB[;2])÷NPT

Y1„TAB[1;1]-TAB[;1]

IXY„X0,[1.5]TAB[;2]+DIF×Y1÷(¯1†TAB[;1])-TAB[1;1]

PLOT TAB,IXY[;2]

    ©

    © --- Correction de la ligne de base par ajustement polynômial

    ©

L1:'Nombre de points selectionnés à bas et hauts' 'champs'

(PTS1 PTS2)„Œ ª IXY2„(PTS1,2)†IXY

IXY3„((-PTS2),2)†IXY

PLOT (PTS1,0)‡(-(PTS2),0)‡DERIV IXY

'Correct ? [1]' ª …(1¬Œ)/L1 ª IXY1„IXY2®IXY3

'Degré du polynôme de fit?: '

    ©

L2:VEC„IXY1[;2]ŽIXY1[;1]°.*0,¼N„Œ

IXY2„IXY1[;1],[1.5](IXY1[;1]°.*0,¼N)+.×VEC

IXY3„(X0°.*0,¼N)+.×VEC

PLOT IXY„X0,[1.5]IXY[;2]-IXY3

    ©

    © --- Réduire les  ondulations de la ligne de base par

    ©     soustraction d'un polynôme de degré n

    ©

n„7 ª PLOT XY„(n PTS1 PTS2) APLANIR DERIV IXY

IXY„X0,[1.5]+\XY[;2]„XY[;2]÷+/+\XY[;2] ©normaliser

'Spectre normalisé : XY, intégrale : IXY'

 

 

 

Figure 2. Traitement d'un signal de résonance paramagnétque électronique (RPE) par les fonctions LISSAGE (I), RECTIFIER (II). Spectre corrigé (III).

 

III - Analyse spectrale.

Après avoir corrigé le signal par les méthodes exposées plus haut, on procède à une  analyse pour déterminer les positions, les largeurs et les intensités intégrées (surfaces) des raies qui le composent. On considère généralement en spectroscopie que les formes des raies élémentaires sont Lorentziennes ou Gaussiennes. A titre d'exemple, la figure 3 montre comment un spectre continu peut être simulé par une somme de Gaussiennes, à l'aide de la fonction FITGS.

 

 

Figure 3. Décomposition en Gaussiennes élémentaires d'une distribution de temps de corrélation de réorientation d'un radical nitroxyde dans le polypropylène solide, déduite d'expériences de résonance paramagnétique électronique. Cette étude, effectuée en collaboration avec M. Catoire de l’ENSAM Paris est destinée à évaluer l’hétérogenéité de ce polymère à l’échelle moléculaire.

 

FITGS

LOI„'fitgs'

'Nom du spectre xy0 à fitter' ª xy0„Œ  dimx„½x1„xy0[;1]

fgs„x1,[1.5]xy0[;2]÷+/xy0[;2]

    ©

L1:'Abscisses des maxima (xc) :' ª d„(nb„½xc„Œ),1

nb,'demi-largeurs gaussiennes (‘x) : ' ª ‘x„Œ

nb,'intensités relatives (ir) : ' ª ir„ir÷+/ir„Œ

COEF„(1+3×nb)½1

'Nombre max. d''itérations :' ª NITMAX„Œ ª NIT„0

    ©  

L2:C„fgs[;2] marq COEF ª coef„C

PLOTFIT tabl1„fgs,FGS

'Itérations supplémentaires? : ‘NIT¬0'

–(0¬‘NIT„Œ)/'NITMAX„NIT+‘NIT ª COEF„coef ª …L2'

xC„xC[ind„“xC] ª iR„iR÷+/iR„iR[ind] ª ‘X„sigma[ind]

       ©

'Ecart-type×1E6 : ',STANDEV 1E6×tabl1[;2 3]

'Paramètres initiaux,paramètres optimisés :'

'Position des maxima (xc,xC), demi-largeurs'

'gaussiennes (‘x,‘X),intensités relatives (ir,iR) :'

    ©

(xc,[1.5]xC),(d½'*'),(‘x,[1.5]‘X),(d½'*'),ir,[1.5]iR

xyn„*¯0.5×D×D„(x1°.-xC)÷E„(dimx½1)°.בX

1 NORMXYN x1,xyn÷E© normalisation des gaussiennes

PLOT tabl2„fgs,(0 1‡ampl×XYN)×(dimx½1)°.×iR

'Autres valeurs initiales? [1]' ª …(1=Œ)/L1

 

 L'ajustement d'une somme de gaussiennes au spectre à simuler est effectuée

par la fonction marq, adaptée d'une fonction utilisant l'algorithme de Marquardt [2]  écrite par Mike Jenkins [3]. Cette  fonction  fait appel à la fonction fitgs qui

calcule à chaque itération de marq le spectre à comparer au spectre expérimental jusqu’à atteindre l'écart-type minimum avec celui-ci.

 

Z„fitgs C

sigma„‘x×|C[¼nb] ª xC„xc×C[nb+¼nb]

    ©

    © --- calcul des Gaussiennes FGS :

    ©

FGS„*¯0.5×ARG×ARG„(x1°.-xC)÷(dimx½1)°.×sigma

FGS„FGS÷(dimx½1)°.×sigma FGS„FGS+.×iR„ir×|C[nb+nb+¼nb]

FGS„Z„(ampl„|C[1+3×nb])×FGS÷+/FGS

    ©

    © --- Evolution de l'écart-type avec le nombre

    ©     d'itérations:

–(0=50|NIT„NIT+1)/'NIT,1E6×STANDEV fgs[;2],[1.5]FGS'

 

Le vecteur C dont les éléments sont initialisés à 1 représente les facteurs ajustés par marq pour optimiser les positions, largeurs et intensités relatives des gaussiennes. Dans le cas très défavorable d'un spectre non structuré comme celui représenté sur la figure 3, rien ne permet de connaître les valeurs approximatives de ces paramètres. On initialise alors le calcul en choisissant un nombre arbitraire de gaussiennes également espacées, de même largeur et de même intensité et l'on effectue plusieurs essais pour trouver leur nombre optimum sur le critère des moindres carrés.

L’interprétation des spectres expérimentaux est l’objectif final des  simulations avec ajustement automatique des spectres calculés. Des programmes APL réalisés dans ce but sont décrits dans la réf. [4]. Ils comportent comme  FITGS  une fonction principale pour l’initialisation des paramètres  et la sortie des résultats qui appelle la fonction marq. Celle-ci optimise ces paramètres par l’intermédiaire d’un module de calcul analogue à fitgs. Au lieu de choisir empiriquement les paramètres initiaux, ces paramètres sont évalués à partir de modèles théoriques propres à chaque spectroscopie. L’accord  entre le spectres expérimental  et la spectre calculé est indispensable pour valider le modèle choisi et les paramètres obtenus.

 

 

 

Figure 4. Spectre RPE d’un radical nitroxyde dans une membrane de phospholipide. Le spectre expérimental est celui de la figure 2-III.

 

Le second exemple  d’applications de programmes APL de simulation  est extrait d’une étude de résonance paramagnétique électronique, en collaboration avec le Dr. Wolf du C.H.U. St. Antoine. Les paramètres obtenus par simulation spectrale  (figure 4)  donnent des informations sur la polarité , l’orientation moyenne des molécules par rapport à la surface de la membrane (ordre moléculaire)  et la viscosité au voisinage d’un radical nitroxyde utilisé comme "sonde". En faisant la même expériences avec plusieurs sondes, on peut évaluer certaines propriétés physico-chimiques à différentes distances de l’interface membrane/eau.

   

Références

1 - Chachaty C. Les Nouvelles d’APL, 15 (1995) 18-26.

2 - Marquardt D.W. J. Soc. Ind. Appl. Math. 11 (1963) 431-441.

3 - Jenkins M.A. APL Implementation of the Levenberg-Marquardt Algorithm,

C.E.N. de Saclay (1978).

4 - Chachaty C. et Soulié E.J. J. Phys. III France, 5 (1995) 1927-1952.